IX‑ LA CARRIÈRE COMME TELLE
Jacques oeuvrât essentiellement dans des entreprises d`envergure où
la langue du travail et des communications était l`anglais. Ils
adoraient se familiariser avec les organigrammes, le personnel, les
méthodes et les philosophies de gestion, les projets de
développement, les procédés techniques, … de ces entreprises en
favorisant les nouvelles technologies, les procédés administratifs
les plus récents et représentant le meilleur potentiel. Son
adhésion à la culture de ces entreprises fut partielle; il se refusa
à être assimilé aux plans linguistique et ethnique. Il pouvait
supporter ces environnements durant trois ou quatre ans après quoi
son insatisfaction devenait apparente.
Un facteur important qui influença la prise de plusieurs décisions
relatives à la carrière chez les Laberge fut le système de double
emploi de Suzie et de Jacques. Par exemple, solliciter pour un
emploi chez Bombardier près de Québec, Jacques dut considérer le
fait que Suzie occupait un emploi stable et qu`elle pouvait
difficilement le laisser et suivre Jacques pour un emploi toujours
incertain dans le secteur privé comme ils l`avaient appris à leurs
dépends.
1‑ Le travail
Une composante importante de la carrière de Jacques pouvait être
présentée de la façon suivante: A travailler souvent dans le domaine
de la gestion, fonction conseil (staff), au lieu d`occuper un poste
d`autorité (line), Jacques était très vulnérable. En période de
ralentissement des affaires, ces fonctions étaient les premières à
être éliminées. En principe, ses fonctions auraient dû être
maintenues afin de solliciter et de faciliter l`ajout, l`obtention
de d`autres projets et produits. Deux des multinationales pour
lesquelles il travailla virent réduire leurs effectifs de moitié
caractérisant l`entreprise privée. De plus, de part la nature de
son travail, souvent affecté à des projets d`envergure, il se voyait
sans occupation lorsque le projet ou les projets étaient réalisés.
Fréquemment, dans le génie‑conseil, par exemple, tout un secteur
d`activités dépendait d`un projet d`envergure tel la participation à
l`ingénierie d`usine d`eau lourde. Dans les grandes industries, la
production d`une division entière était tributaire parfois de la
popularité d`un produit, de la satisfaction des besoins d`un client
important autrement il fallait rationaliser les opérations et
souvent des emplois étaient éliminés dont celui de Jacques.
Certains confrères pataugeaient et d`autres nageaient avec plus ou
moins de facilité dans notre système de libre entreprise, système
cependant préférable à bien d`autres et quand même perfectible.
Suite à la réception d`une offre d`emploi par télégramme, il accepta
un emploi dans une avionnerie, milieu de travail anglophone. Son
emploi lui plut beaucoup; un comité, une équipe de travail révisant
les systèmes d`information de la compagnie et son patron, un
psychologue industriel de profession, assistant du président était
dynamique et communicatif. Ce patron se souciait de son niveau
salarial car un salaire trop élevé aurait pu rendre la recherche
d`un autre poste difficile même à l`intérieur de l`entreprise
particulièrement en début de carrière. En milieu anglophone,
Jacques s`appliqua et maîtrisa la langue de Shakespeare parlée et
écrite toutefois il n`était pas particulièrement intéressé à perdre
son accent français. Sa sensibilité linguistique (francophobe) et
nationaliste lui nuit considérablement car il adhérait peu aux
valeurs de l`entreprise sauf sur les plans administratif et
technique. Avec un certain recul, cette situation lui apparut
clairement comme telle et il se demanda si le contexte de travail
évoluerait au cours des prochaines années chez cet important
employeur. La bataille linguistique se livrait sur un premier
front, ici, et si elle était perdue à Montréal, elle le serait
subséquemment et rapidement dans l`ensemble du Québec. Cette
bataille ne pourrait être gagnée sans l`engagement massif de la
population québécoise car les francophones, on le savait, étaient
nettement minoritaires sur le continent américain, écrivait‑il, dans
de nombreux écrits acheminés aux journaux de l`époque.
Dans cette multinationale anglophone, un employé, dont Jacques se
souvenait, était un vieux superviseur dans la soixantaine très
paternaliste et expérimenté. Il s`intéressait aux mines en tant
qu`investissements personnels à risques et chaque jour, il vérifiait
les cotes souvent hors liste à la bourse. Jacques prépara
l`enregistrement d`un cours pour superviseur avec lui. En une autre
occasion, un superviseur bilingue fut tellement impressionné de
signer la page frontispice d`une procédure qu`il dit à Jacques qu`il
en éjaculait. Jacques et lui avaient travaillé quelques semaines à
la rédaction et à la révision du document. Lors d`une rencontre
déjà décrite dans quelques écrits, il avait discuté en présence de
ce superviseur avec un directeur responsable de trois mille
employés, un américain au Québec depuis neuf mois. Ce directeur
s`adressa à Jacques en français et ce superviseur s`enquit de la
raison de ce geste et il lui répondit simplement que ce n`était pas
pour lui qu`il parlait français. Jacques avait déjà rédigé
certaines procédures en français pour ce directeur.
Une seconde entreprise montréalaise de fabrication d`équipements
électroniques accueillit, en son sein anglophone, notre Jacques,
probablement référé par son dernier employeur. Dans cette
entreprise de calibre international, il y restera peu longtemps et
la quitta avec au moins deux autres professionnels qui décriaient
l`anglais comme langue de travail dans les médias à l`encontre de
leurs intérêts professionnels à l`égard d`une telle entreprise de
haute technologie. Un haut dirigeant anglophone, qui avait appris
le français, eut l`amabilité de le saluer à son départ.
Que d`énergies dépensées improductivement d`un point de vue
nationaliste québécois francophone, pensait Jacques! Que de forces
vives neutralisées ou pour le moins mal orientées! Que de carrières
flétries dès la levée du jour, l`aube de la vie professionnelle!
Quelques éléments francophones réussirent à s`intégrer à ces milieux
de travail, soit qu`ils s`intéressaient peu aux questions sociales,
soit qu`ils originaient d`un milieu culturel bilingue, soit qu`ils
accordaient prépondérance à leur emploi immédiat, à leur carrière.
Plusieurs de ces personnes occuperaient plus tard des postes de
commande aux plus hauts échelons hiérarchiques et espérons,
pensait‑il, qu`ils s`intéresseront un peu au devenir du Québec même
s`ils auront été récompensés de leur adhésion à la culture de ces
entreprises.
Quatre ans de travail en français dans une importante commission
scolaire fut appréciés cependant les effectifs furent réduits et la
priorité fut accordée aux plus anciens employés. Il fut nommé
délégué en matière d`équipement de la commission scolaire au Conseil
scolaire de l`Ile de Montréal. Beaucoup de cadres d`organismes
publics et privés étaient recrutés à partir des membres exécutifs
des syndicats, des associations de professionnels et de cadres. Ces
derniers en venaient à être au fait de la planification stratégique
de l`entreprise pour y être, par la suite, intégrés. A ce moment,
il connut un copain qui devint un cadre supérieur dans la fonction
publique de la métropole ainsi que quelques autres connaissances.
Il joignit un entrepreneur important occupé à un projet
d`infrastructures sportives majeures. Même si ce travail, de part
sa nature, fut de courte durée, il assuma rapidement de lourdes
responsabilités de gestion de personnel et technique. Une analyse
de l`état d`avancement des travaux lui fit conclure à
l`impossibilité de réaliser au complet le mât olympique avant la
tenue des jeux. Jacques fut heureux de rencontrer un québécois
d`origine égyptienne qui lui facilita la tâche de la publication
d`un article dans un périodique à caractère professionnel. Par
contre, Jacques le seconda dans la rédaction de sa thèse de doctorat
en administration scolaire, à titre de consultant, il prit en partie
la relève de son directeur de thèse. Le sujet de cette thèse
reposait sur les principes de gestion de projets que Jacques avaient
approfondis à partir de la documentation des logiciels d`IBM, de
Control Data, de PSDI, … et d`autres sources. Il assista à une
soirée organisée par des ressortissants du Moyen‑Orient qui fêtaient
leur compatriote en présence des représentants politiques et
religieux du Québec et des dirigeants de leur communauté.
Jacques envisagea de partir en affaires avec deux autres ingénieurs
cependant ils réalisèrent rapidement qu`il était plus sécuritaire
d`oeuvrer dans une grande entreprise. Ils avaient déjà décrochés un
contrat de gestion de projet et ils eurent le temps de connaître
brièvement la vie d`affaires à trois sociétaires où généralement des
affinités se développent entre deux partenaires en particulier. Un
de ceux‑là avait vu son père privé de son fonds de retraite ayant
été mise à pied avant de pouvoir en bénéficier ce qui le motivait à
accepter un poste dans la fonction parapublic. Un jour, un ami,
Normand Thivierge, l`invita à postuler avec lui un poste dans une
entreprise de services. Jacques suggéra que l`on invita un autre
confrère de travail, Clément Claveau, à poser sa candidature, lui
aussi. On demanda à Jacques lors de l`entrevue s`il accepterait de
travailler pour Normand et il répondit négativement même s`il
respectait énormément l`intelligence et l`intégrité de son confrère.
Jacques disposait d`une formation supérieure au niveau du deuxième
cycle universitaire et il n`avait pas clairement réalisé que cet
exercice de recrutement visait surtout à procurer de l`avancement à
Normand au sein de l`organisme où il disposait d`appuis. Ainsi, son
confrère, Clément fut choisi et entra dans la boite, la compagnie.
Jacques réalisa une fois de plus que souvent ce n`est pas tant ce
que tu connais qui est important mais qui tu connais.
Un choix professionnel fut effectué entre un organisme parapublic
francophone et une entreprise privée sensément bilingue offrant un
salaire supérieur, il opta pour cette dernière, ayant oeuvré
précédemment dans une organisation parapublic sans y avoir obtenu
de promotion mais quand même une augmentation salariale acceptable.
Ce ne fut probablement pas la meilleure décision de sa carrière!
Qui sais? A ce bureau‑conseil, des travaux étaient réalisés au
Québec et en français, seulement, si le client l`exigeait. A ce
moment, Jacques fit connaissance avec l`Office de la langue
française. il se plaignit de la piètre qualité d`un document
interne, entre autres. A l`emploi de ce bureau‑conseil, il
rencontra un ingénieur originaire de Baie‑Comeau qui avait poursuivi
ses études de génie en Nouvelle‑Ecosse et qui lui parla de M B.
Mulroney en termes plutôt élogieux. Avec un certain recul, Jacques
réalisa qu`il avait reçu des appuis insoupçonnés alors qu`il
recherchait un nouveau défi. Un de ces voisins lui avait
généreusement organisé une entrevue dans une entreprise parapublic
pour le poste de directeur et il avait été accepté.
Malheureusement, crut‑il, il aurait dû retourner au secteur
parapublic où les salaires augmentèrent rapidement, profitant de
cette merveilleuse occasion offerte grâce à la digilence, au sens
pratique, à la sympathie et à l`efficacité de ce cadre. Peut‑être
que subconciemment Jacques considérait comme trop facile cette
opportunité car il avait dû travailler fort constamment.
Jacques s`était vu offrir un poste à San Francisco par un
groupe‑conseil américain de réputation internationale. Jacques
avait qu`il s`agissait quand même d`une entreprise familiale ce qui
l`avait surpris pour une entreprise de cette nature, gestion de
projets qui était depuis très longtemps active au Québec. Jacques
ne voulait pas s`éloigner de sa famille et il refusa.
Les fluctuations de personnels étaient fréquentes dans ces bureaux,
elles étaient hautement tributaires des marchés obtenus. Il en fut
ainsi à un bureau‑conseil interne d`une aluminerie, un des fleurons
de l`industrie québécoise. Heureusement, la décentralisation des
activités avait accéléré la francisation, l`usage du français
comme langue de travail ainsi que les législations québécoises en la
matière. Ici, encore, un certain nombre de ceux qui s`identifiaient
à la culture anglophone et parfois bilingue, furent récompensés et
promus afin de perpétuer ce système le plus longtemps possible. Dix
ans plus tard, il ne fut pas surpris d`apprendre qu`au cours des dix
dernières années un sondage confirmait ses appréhensions, de faibles
progrès accomplis en matière de francisation; un pour-cent en dix
ans. Les programmes étaient appliqués avec tant de laxisme que s`en
était dérisoire. Il refit connaissance avec un copain anglophone,
typiquement « scotchish », qu`il avait rencontré chez son premier
employeur. Ce copain, fort socialement, lui facilita son
intégration. Jacques appréciait beaucoup son humour, son franc
parler, ses appuis indirects efficaces, sa chaude camaraderie et il
se sentait relativement en confiance.
Une courte alte à son travail lui fut imposée après que quelques
malaises l`eurent conduit à une opération afin d`extraire quelques
pierres au rein gauche. Subséquemment, il fut informer des progrès
médicaux pour ne pas dire technologiques en cette matière; les
pierres pouvaient être pulvérisées par des ondes de chocs et
éliminées par voies naturelles. Son spécialiste, néphrologue, lui
avoua après quelques années qu`il pouvait sentir la pierre dans son
rein alors qu`antérieurement il plaisantait lorsque Jacques faisait
quelques allusions à ce sujet. De plus, le spécialiste mentionna
que ces problèmes de santé originaient d`une « trop bonne
alimentation ». Un des buts du suivi annuel consistait à motiver
Jacques à boire de l`eau en bonne quantité et à réduire sa
consommation d`aliments à forte teneur de calcium. Une des trompes
d`Eustache de l`oreille de Jacques s`était fermée temporairement et
un orthorhinologiste lui perfora le tympan sans l`avertir
formellement même si Jacques avait signé une autorisation pour un
traitement. Le spécialiste lui sourit ironiquement sinon
sarcastiquement lorsque Jacques lui demanda si son tympan avait été
perforé. Jacques dut changer de spécialiste même si ce premier
spécialiste âgé consulté pouvait être compétent. Craignant
l`infection, il se débloquait la trompe d`Eustache chaque jour en
soufflant de l`air afin de ventiler l`arrière du tympan. Il ne
considérait pas ces situations médicalement problématiques car elles
ne représentaient en aucun cas un handicap à ses activités
personnelles et professionnelles. Afin de rassurer un ancien
employeur, un spécialiste, un orthorhinologiste avait aimablement
écrit que Jacques ne deviendrait jamais sourd.
Au plan professionnel, Jacques ne pensait pas à ce moment à
l`enseignement universitaire cependant une université lui suggéra de
préparer un cours de français scientifique et technique. Ce qu`il
fit quelques semestres durant et il enseigna aussi l`administration
de projets, sa spécialité. Il apprit également en préparant surtout
ces cours de français comme le veut l`adage à savoir que l`on
apprend aussi en enseignant. En raison de la pauvre qualité du
français des étudiants en sciences, surtout de certains nouveaux
arrivants et moins ceux en français comme tel, Jacques dû présenter
un rappel des rudiments de la langue. A titre de consultant, il
travailla aussi aux études des projets de la Baie James, phase II,
afin de définir le contenu des marchés ou contrats à être
éventuellement octroyés. Il commença quelques cours prérequis à son
admission au doctorat conjoint en administration après avoir
enseigné à cette université et il eut plus tard à choisir entre ses
cours et un poste dans sa spécialité; il choisit le travail. Il
conserva l`impression qu`il aurait pu être accepté à ce moment et on
lui avait proposé quelques charges de cours ce qui lui aurait
procuré un revenu d`appoint. Cependant, lors de sa rencontre avec
le directeur du programme du doctorat, celui‑ci avait souligner avec
emphase ses antécédents au sein du Parti Libéral du Québec
contrairement à ceux de Jacques au Parti Québécois.
Une autre fois, il retourna pratiquer ses professions d`ingénieur et
d`administrateur, dans le secteur privé anglophone et de plus dans
le domaine des télécommunications où des fonctions de gestion de
projets l`attendaient à nouveau ainsi qu`une rénumération
raisonnable. Il avait été interviewé à quelques reprises
individuellement par son patron immédiat et son directeur. Son
grand patron était de race noire et il le seconda courageusement
jusqu`à sa mutation et éventuellement son départ de la compagnie.
Là, encore, il y demeura quatre ans et bénéficia d`une progression
salariale toutefois il ne fut jamais promu. Il sortit fatigué de
ses routines hebdo maires (fait exceptionnel) de mises à jour des
échéanciers et des prévisions budgétaires de projets; il avait mal
au cou et au dos suite à de nombreuses heures de travail à son
ordinateur et ce n`est que quelques mois plus tard et à l`aide de la
technique Nadeau qu`il se départit de ces malaises. Quelques années
après, il apprit par les journaux le décès du maître d`oeuvre, l`âme
de ce groupe de télécommunications dont les membres appartenaient
presque tous à la même promotion d`une université anglophone et ils
n`auraient pu que très difficilement travailler en français même
s`ils l`auraient voulu, souhaité. Jacques était accepté dans cette
équipe comme potentiel successeur d`un gérant qui tardait à prendre
sa retraite, dans trois ans, disait‑on, à celui‑ci et en autant
qu`il veule bien jouer ce rôle spécifique. Antérieurement à
Jacques, plusieurs personnes avaient déjà agi comme adjoint à ce
gérant avant de laisser l`entreprise, c`est pourquoi Jacques ne
s`était pas fait d`illusions. Ce patron fut surpris et il ironisa
du fait que Jacques admit humblement qu`il avait appris au cours de
ces quatre années au service de cet employeur notamment au sujet de
l`organisation, des produits, etc. Il aurait davantage appris
possiblement s`il avait été promu à un poste plus important.
Toutefois, Jacques avait bénéficié d`appuis importants et efficaces
à certains égards durant son séjour chez cet employeur.
Lorsque confortablement, douillettement installé dans une
entreprise, un poste, on était peu motivé à aider quelqu`un d`autre
et il était aussi vrai de dire qu`il n`était pas facile de le faire
à certains niveaux hiérarchiques dans l`organisation. Jacques se
souvenait de quelqu`un qui l`appelait périodiquement au sujet d`un
emploi. Il semblait avoir un profil de carrière susceptible de se
qualifier pour un poste semblable à celui de Jacques. En l`absence
de promotion assurée, Jacques ne pouvait prendre le risque de
seconder cet individu auprès de son employeur. Il en était de même
d`un bureau‑conseil anxieux d`offrir leurs services et de suggérer
l`usage de leur logiciel modifié, adapté localement. Jacques avait
adopté un autre logiciel.
A cette époque, un copain lui disait que les deux frères Johnson
s`étaient rendus chez son employeur. Un avec un petit marché,
semblait‑il, à titre de ministre dans le gouvernement et l`autre à
titre de Chef de l`opposition. Quelle équipe politique!
L`entreprise se devait de maintenir des liens avec les divers
milieux dont les milieux politiques! Un militant péquiste était
surpris que les vice‑présidents se permettent de tels commerces.
Jacques voyait d`un bon oeil de tels liens d`affaires et d`un
mauvais oeil, si ces échanges se concluaient par des contributions
significatives et multiples aux politiciens et aux parties
politiques indirectement de la part de corporations. Jacques
préférait les ingérences politiques québécoises à celles fédérales.
De plus, un gestionnaire appuyé par ces deux politiciens était
potentiellement favorisé.
Afin d`obtenir un poste donné, il fallait presque assumer
officieusement ces tâches avec une certaine connivence des
supérieurs avant d`être officiellement confirmé dans un poste.
D`une façon tacite, les supérieurs et l`entourage évaluaient la
situation, les réactions et si personne s`objectaient vertement, le
prétendant était nommé au dit poste. Si vous acceptiez que les
anglophones même bilingues continuaient, poursuivaient leurs
carrières en anglais, ils vous favorisaient comme prétendant au
poste contemplé, ils vous incitaient même à procéder s`étant assurer
que leurs méthodes, leurs approches ne seraient pas modifiées,
surtout, s`il s`agissait de méthodes manuelles utilisées par
quelqu`un à quelques années de sa retraite. Si vous étiez chanceux,
vous pouviez être seconder par un copain, une connaissance
partageant des méthodes, des approches, des principes similaires.
Votre promotion, par exemple, ne devait pas prêter ombrage à sa
propre image personnelle et sociale. Au contraire, elle devait être
perçue par ce supporteur comme une potentielle amélioration à son
environnement immédiat et susceptible de lui bénéficier à court ou à
long terme.
En attendant de poursuivre ses études en administration, Jacques
compléta ses études élémentaires en espagnol au Pavillon Groulx de
l`Université de Montréal. Il s`agissait d`un cours intensif en
études hispaniques et il obtint une note supérieure à la moyenne de
sa classe composée surtout de jeunes étudiantes et animée par une
professeure originaire d`Uruguay.
Cinq ans après avoir abandonner les cours prérequis à son
inscription au doctorat, il reprit ces études et il devait compléter
les deux cours prérequis à son admission au programme conjoint
montréalais (quatre universités) de doctorat avec une moyenne de B.
Un de ses travaux concernait le traité de libre‑échange qu`il traita
honnêtement en évaluant les avantages et les inconvénients en une
période de polarisation. Toutefois, il fut déçu par
l`administration des examens; entre autres anomalies presque tous
les étudiants sortirent de la salle d`examen sans surveillance
durant un examen théorique en l`absence du droit aux notes. Il s`en
plaignit au professeur et au ministre québécois concerné après qu`il
eut été refusé au doctorat pour raison de contingentement.
L`adjoint au directeur du département avait prévenu Jacques qu`il
devrait être suivi étroitement. Il pensait que s`il avait été
accepté au doctorat, il aurait peut‑être pu changé cet état de chose
alors qu`étant refusé, il se devait moralement de signaler ou
souligner cette situation à qui de droit. Face à de telles
méthodes, il se voyait mal poursuivre ses études dans un milieu où
la loi de la majorité, de la meute, prévalait sur de sains procédés
auxquels il avait toujours été soumis dans la poursuite de ses
études tant collégiales qu`universitaires ainsi de dans sa propre
administration d`examens à l`université, cette même université! Un
professeur lui fit remarquer que la formation à ce niveau
correspondait à la programmation de l`individu et il ne croyait pas
que Jacques en souffrirait réellement. Il comprit qu`en l`absence
de programmation conventionnelle à forte saveur fédéraliste de
troisième cycle, il arriverait quand même à des solutions, des
réponses originales et, souvent, judicieuses constituant, peut‑être
d`importantes contributions dans son milieu. Il s`agissait d`une
programmation, entre autres, aux valeurs fédéralistes
conventionnelles qui encourage la propagation, la perpétuation du
système actuel et qui nuit, empêche le renouvellement, le
ressourcement et la créativité authentiques. De plus, ce professeur
disait que les journalistes financiers et de d`autres sphères
d`activités des grands journaux et périodiques étaient généralement
d`anciens décrocheurs de Polytechnique, des Sciences Sociales, des
Hautes Etudes Commerciales, … et qu`ils effectuaient un travail
terriblement pauvre en ces matières. Jacques réalisait que le
travail de journaliste était exigeant et qu`ils devaient subir de
nombreuses contraintes les empêchant de présenter leurs vues
intégrales des événements devant composer avec les intérêts des
propriétaires de journaux et des dirigeants politiques et
économiques. Il observa qu`un cadre supérieur d`entreprise, docteur
en administration, même bien « programmé », eut des déboires comme
gestionnaire et il fut récupérer par le fédéral en raison de ses
contacts et de sa diplômation.
Jacques avait soumis sa candidature à titre d`ingénieur dans la
fonction publique. On l`inscrivit à un concours pour un poste dans
la région de Québec comme telle et à un salaire nettement inférieur
à celui de son dernier emploi. Il lui aurait fallu défrayer les
coûts d`une troisième résidence, être éloigné de sa famille la
semaine durant, démissionner de son poste d`administrateur à l`Ordre
des ingénieurs du Québec, épauler de loin son grand garçon qui
nécessitait, semble‑t‑il, encore ses deux parents, … Pour toutes
ces raisons, il recula au stade de l`examen d`élimination basé sur
les capacités d`analyse, de synthèse, de notions générales
pertinentes à la gestion de projet et à la rédaction de documents.
Etant peu intéressé au poste, Jacques ne voyait pas l`intérêt
d`essuyer possiblement un échec inutilement. Les aspects positifs
de ce poste étaient quand même pas négligeables; emploi sécuritaire,
secteur d`activités connues, … S`agit‑il d`une bonne décision?
Jacques avait déjà regretté de ne pas avoir accepté un emploi dans
la fonction parapublic! Avec un tel salaire, Suzie n`aurait pu
prendre une année sabbatique car ce salaire ne permettait pas de
maintenir le même niveau de vie familial. Joindre la fonction
publique correspondait pour Jacques à se bâillonner, à ne plus
publier ses opinions, à ne pas publier son essai. En définitive,
notre société était très peu libérale, pensait Jacques. Un employé
d`une société d`état ayant révélé publiquement des renseignements
privilégiés en savait quelque chose, en avait fait l`expérience à
ses frais! C`est ainsi que le nouveau président de la Caisse de
placement et de dépôt du Québec soulignait que son prédécesseur à
titre de retraité se permettait de s`affirmer souverainiste et
quant à lui il était trop jeune, trop actif professionnellement pour
se prononcer. Il voulait profiter au maximum du système actuel!
Un de ses supporteurs ou alliés politiques sans emploi depuis
quelques mois l`avait encouragé à accepter ce poste à Québec afin de
poursuivre sa carrière ou d`effectuer un nouveau départ. Ce geste
signifiait pour Jacques la fin ou la modification de liens amicaux,
politiques et d`affaires. Jacques ne possédant pas les mêmes
valeurs, les mêmes intérêts que son copain ou à des degrés
différents n`avait pu s`associer à sa démarche politique ce qui
avait, à plusieurs points de vue, freiné sa carrière et grever ses
revenus durant plusieurs années tandis qu`il avait quand même tiré
avantages de certaines expériences. Ses exigences en matières
politiques l`avait conduit à refuser une participation active au
sein de son parti politique jugeant le prix des compromissions trop
lourd. Son copain s`évertuait par tous les moyens à lui prouver
qu`il avait tort tant au plan personnel, carrière qu`au plan
politique car il s`agissait du moindre mal, la meilleure des deux
options. Pourtant, la politique était quelques fois définie comme
l`art du possible et Jacques comprenait les positions de plusieurs
militants qui se satisfaisaient de mesures souverainistes à divers
degrés et comblaient de ce fait certains de leurs besoins dont celui
d`obéir à un leader fort pour dire le moins. Un grand leader! Oui,
mais suffisamment grand pour se tenir debout! Son refus de
s`engager politiquement, à ce moment, le conduirait probablement,
comme à l`accoutumée, dans un milieu de travail où les préoccupations
indépendantistes seraient encore plus lointaines, la grande
entreprise. Ainsi, Jacques se doutait qu`il retournerait travailler
en milieu anglophone ou pour le moins bilingue car trop de dirigeants
étaient à genoux devant les anglophones, les fédéralistes et parmi
eux on retrouvait beaucoup de politiciens, nos décideurs nationaux,
nos élites! Quelle victoire! Quel soulagement! Les éléments, les
plus indépendantistes étaient ainsi neutralisés, bâillonnés et les
tractations fédéro‑souverainistes se poursuivaient au plus grand
plaisir de nos dirigeants.
Jacques se tenait au courant des actualités dans divers domaines.
Il recevait régulièrement des publications de nature générale: La
presse, La Relève, La Seigneurie, El Correo, le Sommet, …, de
nature nationaliste: L`Action Nationale, L`Autr`journal, …, de
nature professionnelle: Le Plan, Le Plan régional, L`Ingénieur,
Engineering Digest, la revue des diplômés de l`Université de
Montréal, la revue « Birmingham Magazine », Direction informatique,
Action informatique, …, à caractère religieux: Le Colombien,
Columbia, Le Fureteur, …
A un moment ou à un autre, Jacques avait communiqué par écrit avec
Messieurs Fernand Daoust, Jacques Hébert, Jean‑Paul Desbiens, Alain
Stanké, Louis Dumais, Robert Jim Stanley, Marcel De Cotret, Guy
Joron, Felipe Nunez, … surtout pour exprimer des points de vue
relatifs aux milieux de travail ainsi qu`à la société québécoise
dans son ensemble et à titre de correspondance personnelle.
Sur la Rive‑Sud à Saint‑Bruno de Montarville plus précisément, il
semblait que plus de dirigeants originaient de cette ville que de
partout ailleurs en Montérégie compte tenu de sa population, un
milieu très propice à l`éclosion de prospères carrières, une
pépinière des plus fertiles, un milieu décisionnel, l`Outremont
sinon le Westmount de la Montérégie suivi de près par Saint‑Lambert,
croyait Jacques. Peut‑être que l`association des propriétaires
constituait un outil de concertation efficace dont Jacques ne
connaissait pas l`existence dans sa municipalité. Les emplois
disponibles en banlieue étaient souvent d`importance moyenne et
avaient peu convenus à Jacques. A Varennes, le noyau de dirigeants
municipaux et peut‑être des associations d`affaires semblaient peu
efficaces dans l`entraide professionnelle relativement à une
municipalité comme celle de St‑Bruno. Less professionnels ne
semblaient pas bénéficier de réseaux officiels ou/et officieux,
peut‑être, en raison du faible nombre de professionnels occupant des
postes d`importance.
2‑ Les considérations afférentes
Plusieurs québécois venus à Montréal de d`autres régions du Québec,
souvent, se sentaient moins bien accepté que les immigrants de
d`autres pays et même après des dizaines années à Montréal et
fréquemment suite à une formation montréalaise. A titre d`exemple,
Jacques avait vécu vingt ans dans le Bas‑du‑Fleuve, vingt‑neuf ans à
Montréal et un an en Europe entrecouper de brefs séjours à
l`étranger. Des amis immigrants l`avaient souvent intégrés à leurs
réseaux relativement bien organisés et efficaces.
Jacques avait observé qu`en périodes difficiles, il se tournait vers
ses proches, ses semblables afin de reprendre son souffle,
d`apporter sa contribution aux associations locales et
professionnelles avant de poursuivre ses activités en d`autres
milieux et de diversifier ses expériences tant professionnelles que
personnelles.
Si vous étiez un militant peu ou pas actif de l`indépendance et de
la souveraineté, disposant peu de temps pour se faire car vous
occupiez un poste accaparant et étiez suffisamment flexible, il
était préférable dans une optique fédéraliste que nous jouiez ce
rôle plutôt que d`être actif dans un parti politique et
éventuellement à l`Assemblée Nationale. Cependant, il fallait que
le cadre se limite à la dimension plutôt personnelle de ses
convictions et son développement était favorisé par un milieu de
travail majoritairement francophone comme devrait l`être le monde du
travail québécois. Ainsi, ces quelques cadres favorisés par le sort
se développaient, se réalisaient harmonieusement. Jacques espérait
que l`indépendance favoriserait un plus grand nombre de ces succès
personnels. Pour ces cadres, il s`agissait déjà d`un apport minimal
intéressant toutefois on était loin d`une implication sociétale
entière. Une connaissance, un professionnel avait rencontré M. René
Lévesque relativement à ses projets de carrière et il avait conclu
que ses chances d`avancement seraient très faibles et il s`était
orienté du coté fédéraliste où il devint président d`un groupe
pan‑canadien.
Son épouse l`incitait à identifier les raisons justifiant quelques
changements d`emploi ou l`absence de promotions même si sa
progression salariale avait été satisfaisante. Le plus
objectivement possible, il considérait les raisons suivantes: faible
ou peu d`adhérence à la culture de l`entreprise (langue de travail,
politiques d`investissement, par exemple, hors Québec, politiques
d`achat non préférentielles au Québec, politiques de recrutement, de
promotion, …), faible enracinement montréalais, origines modestes,
principes moraux et éthique professionnelle, appui à la
francisation, … Notons, ici, qu`une des motivations à la
poursuite de ses études fut la conviction que ses propos seraient
plus crédibles s`il bénéficiait d`une formation universitaire. A ce
moment là, dans un de ses nombreux articles, il soulignait le sort
fait par la société québécoise; perte d`emplois, anonymat, … à un
des premiers indépendantistes avoués: Marcel Chaput alors que les
leaders, les dirigeants voyant à leurs intérêts personnels et
favorisant les politiques fédérales étaient allègrement promus,
souvent, à partir des officines gouvernementales. Il se demandait
quel était le prix de ses convictions en pertes salariales
significatives détrimentales à sa famille dans son ensemble?
Quelques fois Jacques vivait dans un climat de suspicion engendré
par son inactivité professionnelle temporaire et l`inquisition de
Suzie en personne intelligente et dynamique répondant aux stimulus
sociaux et à sa soif de connaissances, de savoir pourquoi il en
était ainsi. Ce climat plaçait Jacques dans une position défensive
et d`insécurité accrue ce qui contrastait avec le climat serein et
positif sinon de confiance souhaitable à l`affirmation personnelle
et professionnelle surtout au cours d`entrevues. En ces périodes de
déboires professionnels ou d`affaires, il fallait comprendre que les
effusions et l`effervescence amoureuses pouvaient être altérées chez
les Laberge. Suzie faisait preuve énormément de sérieux et de
maturité compte tenu de ces circonstances adverses. Ils essayaient
de défendre, maintenir les acquis familiaux afin de ne pas ajouter à
la problématique du moment. Cela représentait tout un défi!
Jacques avait souvent demandé à Suzie d`éviter d`intervenir dans sa
vie professionnelle car il était très difficile d`aider quelqu`un,
même un conjoint. Ils évoluaient dans des milieux bien différents.
Une épouse, un ami pouvait nuire plus qu`aider en s`impliquant
directement. Il s`agissait probablement d`un opération valorisante
et, souvent, nuisible sinon responsable de délais inutiles. Le
temps de réaliser que la nature des débats, plusieurs semaines, mois
étaient écoulés sans contributions significatives. Dans sa famille,
on était pas ou n`avait pas dû intervenir dans ses affaires, on
l`écoutait, l`encourageait, lui présentait des suggestions, dans un
climat constructif réalisant que la vie représente un défi pour
chacun d`entre nous. Et que, la perception de son avenir et les
modalités de son épanouissement, lui appartenaient.
Jacques laissait le plus de latitude possible à Suzie afin de lui
permettre de réagir aux situations quelques fois désagréables, de
vivre ses émotions naturellement, d`exprimer son désarroi et son
agressivité souvent justifiés par les variances constatées entre les
objectifs et la réalité. Il lui semblait préférable « de laisser le
roseau fléchir plutôt que de le maintenir rigide de crainte qu`il se
casse ».
Lors d`une entrevue, il devait réaliser et souligner que sa
principale réussite professionnelle et personnelle consistait, entre
autres, à avoir maîtriser la gestion de projets réalisée
manuellement et à l`aide de logiciels simples et, surtout,
sophistiqués que moins de dix professionnels de calibre
international pouvait efficacement utilisés. Jacques en poursuivant
jeune ses études complémentaires en administration avait acquis tout
au cours de ces expériences de travail non seulement une
connaissance spécialisée de fonctions données mais aussi une
connaissance générale de la gestion, culture des entreprises privées
et des organismes parapublics. Au cours de la même entrevue, le
futur patron lui posa quelques questions quant à sa propension à
livrer par écrit ses remarques et ses observations relativement à
son milieu de travail, culturel, politique, … ainsi que le nombre
d`heures allouées au service de sa profession en tant
qu`administrateur élu. Heureusement que Jacques se limitait
généralement à être actif dans une seule organisation à la fois
malgré le fait qu`il était constamment sollicité.
En discutant avec un confrère ingénieur qui piétinait
professionnellement pour diverses raisons, Jacques, perçu qu`il
avait atteint le palier supérieur à titre d`ingénieur dans une
entreprise multinationale dans le domaine de la haute technologie.
Jacques écoutait longuement ce confère et il essayait de le
conseiller et de l`encourager à se reprendre en mains. Il croyait
qu`en aidant les autres, il s`aidait lui‑même en augmentant ses
connaissances et en se familiarisant avec leurs organisations et
leurs problèmes. Ainsi, il accroissait son champ d`influence!
Après avoir reconnu visuellement et été reconnu par un cadre d`une
grande municipalité lors d`une réception, Jacques fut surpris que
celui‑ci se rappelait son nom. Jacques lui présenta un confrère qui
avait oeuvré au même projet et poursuivi ses études en
administration et en droit cependant il ne se le rappelait pas,
seulement Jacques, qui fut quelque peu embarrassé pour son confrère.
Il en conclut que son souci de « donner l`heure juste » avait au moins
été reconnu par le client à défaut de l`avoir été par son ancien
employeur. Même les professionnels n`échappaient pas aux pressions
politiques et administratives à tous les niveaux hiérarchiques.
Dans l`exercice de sa profession, ses professions d`ingénieur et
d`administrateur, Jacques voyagea peu à son avis. Il suivit un
cours relatif aux systèmes d`informations corporatives mécanisées de
l`American Management Association à Chicago. Il aurait aimé aller
en Australie et passé quelques jours à ses frais aux Iles Fiji
lorsqu`il travaillait à des projets d`alumineries sises dans ce
pays. Par contre, il eut le loisir d`apprécier le modernisme des
laboratoires de recherches et des usines de Toronto et d`Ottawa de
diverses multinationales. Il eut droit à une visite en hélicoptère
de la Baie James et le pilote dû être surpris qu`un de ses passagers
ne fut pas malade, Jacques en occurrence, qui s`en « sortit » en
regardant au sol constamment. Heureusement que Jacques avait voyagé
au frais du Commonwealth (payé par les québécois et québécoises) et
à son propre compte! Lorsque vous prôniez le démantèlement du
Canada, l`on vous laissait derrière votre bureau! Une technique
répandue consistait à offrir un voyage à quelqu`un comme mesure
compensatoire à une promotion manquée. Ou pour vous éloigner si
vous représentiez un obstacle ou n`étiez pas désiré à un moment
donné ou stratégique. Ou encore, si vous étiez démobilisé ou
nerveux, un changement de décors pouvait contribuer à votre détente.
Evidemment, les exigences du travail pouvaient également conduire à
des déplacements.
Dans les milieux de travail, Jacques fut près d`écossais,
d`ontariens remarquables, respectables et respectueux, de
terre‑neuviens humains, d`irlandais sympathiques compatissants aux
déboires des québécois, de résidents de l`Ouest canadien compétents
et préoccupés par l`unité canadienne, d`américains prêts à respecter
les exigences culturelles québécoises, de montréalais anglophones
intégrés, non intégrés, intégrables et non intégrables et
s`exprimant généralement en anglais. Ce paragraphe aurait semblé
des plus brefs à Jacques pour traduire de très nombreuses années de
contacts journaliers dans des climats de travail constructifs et
généralement harmonieux. Plusieurs confrères anglophones
connaissaient ses orientations politiques cependant ils le
sollicitèrent adroitement pour qu`il se joignit à leurs diverses
associations croyant pouvoir plus efficacement l`aider. Ils auraient
aimer le voir s`installer dans l`Ouest de Montréal et s`intégrer à
leur communauté. Il aurait contribuer à consolider la communauté
anglo‑québécoise et surtout anglo‑montréalaise comme bon nombre de
francophones. Ainsi, Jacques aurait sûrement eut la vie plus facile
au plan professionnel.
Au plan syndical, il s`était impliqué au niveau du conseil
d`administration de l`association des ingénieurs d`une industrie de
haute technologie. Il fut membre de l`association des
professionnels lorsqu`à l`emploi d`un importante commission
scolaire. De retour, plus tard, dans le domaine de l`ingénierie, il
sera de nouveau membre d`un association d`ingénieurs. Il ne
s`agissait pas de syndicats proprement dits. Néanmoins, leurs
méthodes étaient souvent empruntées ou s`apparentaient à celles de
ces derniers. Souvent, les dirigeants de ces associations étaient
intégrés à la direction de l`entreprise.
Suzie, l`épouse de Jacques, quelques fois, croyait, qu`en harcelant
Jacques, elle pourrait changer certaines orientations
professionnelles, politiques, … Il lui expliquait que personne ne
l`avait presser jusqu`à ce jour et qu`il avait quand même
relativement réussit sa vie personnelle et professionnelle. En
période d`accalmie professionnelle, Suzie ne se sentait pas capable
d`assumer le rôle de soutien de famille si ce n`était au coût de
beaucoup de stress et Jacques la comprenait. Dans le milieu
familial de Jacques, l`on s`encourageait mutuellement en misant sur
les habilités de chacun. Après avoir obtenu une certaine sécurité
matérielle, il voulait être un peu plus lui‑même, respecter ses
valeurs sociétales, réaliser quelques projets que les exigences du
travail professionnel dans l`entreprise privée, un certain esclavage
souvent bien rénuméré et intéressant, l`avait empêché de mener à
bonnes fins. Il voulait s`impliquer socialement et
professionnellement comme il le fit au cours de plusieurs années.
Suite à de nombreuses années de travail et de réalisations, il
n`était pas toujours prêt à tout sacrifier pour son travail
professionnel. Trop souvent, un patron zélé ou tyrannique empêchait
inutilement le travailleur professionnel de s`impliquer
sociétalement surtout s`il ne partageait pas les mêmes valeurs, par
exemple, fédéralistes et indépendantistes. Souvent, un nationaliste
était placé en porte à faux, il avait à choisir entre sa « cause »,
ses valeurs et ses intérêts personnels et dans un milieu de travail
majoritairement anglophone rien de plus facile sinon fréquent.
Jacques réalisait que les travailleurs intellectuels étaient souvent
débordés lorsqu`au travail, dans le système; temps surnuméraire, …
alors que d`autres rejetés temporairement par le système avait tout
loisir de réfléchir et ils étaient réellement inactifs et
fréquemment isolés. Dans un projet de société québécoise, il
faudrait reconnaître le droit au travail au moins à ceux qui le
désiraient. Un autre sujet sur lequel il avait réfléchi était celui
de l`accession à un poste donné. Il lui semblait que les méthodes
employées par certains candidats étaient souvent non orthodoxes et
que l`utilisation de telles méthodes était oubliée dès le jour de
leur promotion ou de leur nomination.
Son franc‑parler et la franchise de ses écrits au sujet de
situations concrètes; chantier olympique, commission scolaire,
entreprises privées, … et des problèmes d`éthique et d`intégrité
professionnelles ne furent pas toujours favorables à son avancement.
Un ancien ministre disait à la légère que « la plus belle fille du
monde ne peut offrir que ce qu`elle a, possède ». Il en est de même
d`amis originants d`humbles milieux. Pour obtenir plus, il faut
faire comme certains politiciens, entre autres, s`approcher de
grands financiers et des grands de ce monde. Et, il faut se
conformer à leurs règles et à leurs exigences. A un palier
inférieur, l`on doit se comporter de manières semblables afin
d`éviter de mordre la main qui nous nourrit, nous aide. Au
contraire, il faut anticiper, prévoir leurs désirs et devancer leurs
demandes et leurs actions dans certains cas. Leur témoigner
beaucoup de déférence, de soumission, de fidélité, de supporter
courageusement les inconvénients de la situation représentaient des
mesures désirables. Il était souhaitable d`indiquer notre
satisfaction, notre appréciation; certains petits gestes de
gratitude de nature surtout à flatter l`égo des dirigeants.
Quelques fois au lieu de recourir à des services d`indépendants de
l`organisation, mieux valait s`adresser à un membre de
l`organisation sinon à un allié même si la nature des services
n`était pas identique. Tout devait être mis en branle pour
consolider les activités du groupe et souligner ses interventions
aux décideurs susceptibles de favoriser son avancement. Les
contacts personnels de toute nature devaient être cultivés par tous
les moyens possibles. Cette formule n`était, peut‑être, pas gagnante
à tout coup mais elle en était probablement une bonne dans une
entreprise donnée à un moment donné, pensait Jacques. Il aurait
offert ses voeux de bonnes chances à ceux, aux arrivistes, qui
pouvaient se conformer à une telle démarche!
N`appartenant à aucun parti politique à un moment donné, Jacques
s`était risqué à écrire à Monsieur Bourrassa pour lui mentionner ses
insuccès au nombre de plus de trois cent offres de service présentés
à des postes de différentes natures et à divers paliers
hiérarchiques dans la recherche d`un emploi, il connaissait à
l`avance la réponse protocolaire des membres de son Bureau pourtant
il souhaitait voir circuler son nom et son pedigree en ce milieu.
Les coordonnées de la fonction publique québécoise fournies par le
Bureau du PM devaient s`avérer erronées. Il soumit une offre
d`emploi à quelques dirigeants d`entreprise: Messieurs Claude Béland
(Desjardins), Laurent Beaudoin (Canadair‑Bombardier), Pierre
Péladeau (Québécor), Guy St‑Pierre (SNC), Richard Drouin
(Hydro‑Québec), Larkin Kerwin (Agence spatiale de Saint‑Hubert), …
et ce fut apparemment sans succès probant. Jacques obtint presque
des emplois chez Sidbec‑Dosco en gestion de projets, à la ville de
Montréal comme commissaire industriel et à la IRSST à titre de
conseiller en conception et en gestion de projets. On le disait bon
deuxième alors qu`il se devait d`être premier et l`on déplorait
quelques fois ses faibles appuis politiques. De plus, il avait été
reconnu comme qualifié à titre de coordonnateur des systèmes
informatiques par la Communauté urbaine de Montréal et interviewé à
l`Ecole de Technologie supérieure comme professeur en génie
électrique et doyen. Il avait aussi rencontrer le responsable de la
gestion de projet chez Oerlikon, il venait d`être recruté d`une
compagnie ayant effectuée plusieurs mises à pied.
Jacques refusait rarement d`appuyer une candidature à la poursuite
d`études supérieures ou à l`assumation de responsabilités
professionnelles ou communautaires malgré le risque que des
personnes de mauvaises fois, Hé Oui! Il s`en trouve!, utilisent ces
personnes appuyées, recommandées contre lui. En dépit de tout,
Jacques préférait adopter une attitude positive et seconder les
éléments dynamiques de son milieu, lui‑même ayant été à plusieurs
reprises le bénéficiaire de tels appuis.
Suzie encourageait Jacques à se questionner au sujet de son attitude
face à l`autorité! Etait‑il contre toute autorité, tout dirigeant?
Aurait‑il voulu prendre leurs places, être à leurs places? Etait‑il
prêt à consentir les efforts pour arriver, pour être promu à ces
postes? Désirait‑il vraiment exercer de telles fonctions? Ses
expériences personnelles à la direction le motivaient‑elles à cet
égard? Etait‑il important d`accéder à de hauts postes? Savait‑il
laisser cours au libre choix des décideurs? Savait‑il profiter des
opportunités? Avait‑il peur des responsabilités du point de vue de
leurs impacts et de leurs conséquences sur la société? Pouvait‑il
accepter que son apport à la prise de décision soit fragmentaire
même en tant que principal gestionnaire? Pourquoi investir tant de
temps, d`énergies et d`argents pour un contrôle partagé, un pouvoir
partiel? Pourquoi ne pas se concentrer exclusivement sur des
activités rénumératrices? Pourquoi ne pas essayer de rendre
payantes toute activité? Pourquoi ne pas oublier les intérêts
sociétaux et se concentrer sur ses intérêts personnels? Comment son
enfance et son adolescence, l`avaient marqué? Avaient‑ils influencé
son cheminement, sa vie personnelle, sa carrière, ses engagements
sociaux et autres? L`absence partielle de modèle paternel
avait‑elle largement influencé ses comportements; son attitude face
à l`autorité. S`adressait‑il assez souvent aux dirigeants?
Maintenait‑il vivants, opérationnels les liens avec les hauts
dirigeants, les supérieurs? Avait‑il peur d`eux? Leur était‑il
réfractaire? Considérait‑il ses supérieurs comme des alliés, des
collaborateurs nécessaires voir même essentiels? Se privait‑il de
leurs conseils, de leurs orientations, de leurs directives, de leurs
connaissances et de leurs informations? Manifestait‑il un besoin
autonomiste irréaliste? Réalisait‑il sa dépendance intrinsèque en
tant que membre d`une équipe à quelques niveaux que se soient? Quel
était la qualité de ses communications avec ses supérieurs?
Redoutait‑il l`évaluation sévère, la critique de ceux‑ci?
Valorisait‑il trop les relations entre confrères de même niveau
hiérarchique ou de niveaux inférieurs? Essayait‑il constamment de
se constituer une équipe de supporteurs? Prônait‑il ses propres
théories et ses méthodes auprès de son entourage? Se conformait‑il
aux directives, aux souhaits clairement exprimés par la direction?
Voilà beaucoup d`interrogations auxquelles Jacques aurait pu en
ajouter bien d`autres! Désirait‑il être omniprésent? Désirait‑il
tout régenter? Acceptait‑il la contribution de nombreux dirigeants
dans les multiples sphères d`activités? Ses démarches personnelles
s`harmonisaient‑elles à la réalité hiérarchique des divers milieux?
Oeuvrait‑il à rebours, à contre courant? Neutralisait‑il ainsi ses
efforts? Noyait‑il ainsi les résultats obtenus ou escomptés au coût
de maints efforts? Se privait‑il d`expériences plus significatives
en recherchant l`autonomie personnelle, l`indépendance individuelle?
Ce questionnement alimentait et animait profondément la vie
intérieure, les réflexions et les actions de Jacques!
Questionnement effectué sereinement à titre de scientifique qui ne
deviendra jamais le monopole de la vérité, ni des connaissances mais
qu`un infime filon. Il aurait aimé profiter au maximum et
rentabiliser ses efforts dans les multiples aspects de sa vie
personnelle, professionnelles, sociétales, …. Le nombre et la
diversité de ses questions témoignaient et précisaient le degré
d`intériorisation chez Jacques. Il réservait, toutefois, ces
interrogations pour les périodes d`accalmie professionnelles et
personnelles. Dans l`ensemble, les réponses à ces questions
favorisaient son avancement compte tenu des observations et des
remarques exprimées dans ce récit, croyait‑il!
Une proche connaissance influencé par des amis lui répétait
constamment qu`il fallait prendre des risques pour prospérer! Il
fut moins convainquant après que le père d`un de ses amis eut fait
faillite. Prendre des risques, c`était également risquer de perdre
l`acquis. Il s`agissait tout de même d`une attitude positive à
mûrir pour un jeune de moins de vingt ans. La fête de la Reine ou
plutôt la fête de Dollars semblait une journée d`opportunités pour
Jacques. A quelques reprises, de nouvelles avenues s`étaient
ouvertes à lui. Question de hasard, pensait‑il!
Les gens parlaient quelques fois de scientifiques distraits dans
l`exécution de travaux banals. Jacques visualisait comme possible
cette situation lorsque quelqu`un se concentre, monopolise ses
énergies intellectuelles pour accomplir une tâche difficile et
d`envergure requérant un effort de mémorisation et de raisonnement.
Solutionner un problème ou continuer à réfléchir à un sujet pendant
l`exécution d`une tâche routinière était fréquent et pouvait
conduire à de faibles résultats ou des performances atténuées,
réduites relativement aux possibilités, au potentiel de l`individu.
Voilà, pour une explication plausible et expérimentée! Ainsi, même
après avoir maîtriser un sujet à un moment donné, quelqu`un devait
se remémorer les données et les principes soit du procédé, soit de
l`activité, surtout après plusieurs mois et plusieurs années.
Chaque fois que Jacques reprenait le collier, le travail dans une
entreprise, il avait la sensation de se couper des débats publics,
de cesser de vivre publiquement ayant peu de temps pour suivre
l`actualité, analyser les démarches politiques, définir ses propres
positions, … Par conséquent, il avait l`impression de perdre, de
sacrifier plusieurs éléments importants de sa vie en raison de sa
sensibilité sociétale. L`expression « avoir l`impression de perdre
sa vie » lui échappa dans une discussion avec un copain et il ne
pouvait s`empêcher de penser que cette expression était forte et
jusqu`à un certain point prétentieuse.
Les entreprises familiales québécoises étaient comme toujours
vulnérables. Désourdy avait été vendu à des intérêts français,
Lavalin subissait de sérieux déboires, Steinberg avait été repris
heureusement par des québécois, Pascal fermait, … Dommage pour
l`économie québécoise!
Nos dirigeants politiques voulaient bien s`adjoindre quelques
scientifiques, quelques rares ingénieurs à titre de dociles
exécutants politiques, techniques des volontés politiques des grands
élites en la matière. Le peu d`envergure sociétal des scientifiques
les vouait à une servilité méritoire, semblait‑il! Pour des raisons
de survivance et d`épanouissement économiques et financiers, les
professionnels du génie, entre autres, vivaient sous la houlette des
politiciens majoritaires de formations différentes ou sans formation
particulière. Leur faible crédibilité politique les confinait, par
conséquent, à jouer un rôle surtout sinon exclusivement économique
que, d`autre part, on leur reprochait fréquemment. Un membre
émérite de la profession soulignait avec justesse lors de
l`obtention d`une rare reconnaissance publique que la piètre
crédibilité des ingénieurs originait de leur faible production
littéraire. Jacques se demandait si les ingénieurs auraient été
plus prolifiques si leurs efforts en cette matière avait été mieux
accueillis, recherchés, valorisés, encadrés, … Il se rappelait
qu`un hebdomadaire avait refusé un de ses articles relatifs à la
profession d`ingénieur alors que la parution de la même semaine
faisait état de similaires situations chez les architectes qui
essayent d`obtenir une mobilité professionnel au Canada, mobilité
déjà acquise chez les ingénieurs dont certains favorisait une
visibilité et une représentativité internationales accrues pour les
ingénieurs et les ingénieures québécois. A l`ère de la technologie,
la société était encore privée jusqu`à un certain point de l`apport
des scientifiques tant sur le plan de l`écrit et du commentaire
scientifique que sociétal, c`est‑à‑dire une contribution originale à
titre de scientifique comme tel.
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